Terence Broad, chercheur et spécialiste de l’art génératif, est parvenu à faire produire des images à une intelligence artificielle sans aucun apprentissage préalable. Cette découverte ouvre de nouvelles perspectives sur le fonctionnement de l’IA.

Peu de personnes savent qu’il est possible de faire générer du contenu à une intelligence artificielle sans aucune donnée d’entraînement, contrairement aux modèles génératifs habituels.

Terence Broad, artiste et chercheur spécialisé en art génératif, y est pourtant parvenu en 2019 avec son projet baptisé (un)stable equilibrium. L’exploit équivaut à demander à une personne n’ayant jamais vu de peinture de créer une œuvre d’art.

Une mission impossible en théorie, mais plutôt bien réussie en pratique. Puisque la série d’œuvres obtenues rappelle étrangement les toiles de Mark Rothko (1903-1970), maître de l’expressionnisme abstrait américain, selon l description qu’en fait le site d’information spécialisée tech, The Verge.

La méthode de Broad consiste à créer une boucle récursive où deux réseaux de neurones dialoguent et s’imitent à l’infini, tel un jeu de miroirs sans fin. Grâce à quelques paramètres techniques évitant la monotonie chromatique, cette interaction produit spontanément des images colorées.

Une véritable prise de position éthique

Pour l’artiste alors doctorant en informatique à Goldsmiths, cette démarche ne relève pas seulement de l’expérimentation artistique, mais d’une véritable prise de position éthique face aux dérives de l’intelligence artificielle contemporaine, marquée par l’ingestion massive de données.

Cette prise de conscience découle des accusations de violation du droit d’auteur que lui avait adressées Warner Bros après « Blade Runner — Autoencoded », projet artistique créé en entraînant un réseau de neurones sur chaque image du film « Blade Runner » (1982).

« Quand vous recevez un DMCA (loi américaine de protection des droits d’auteur), vous pouvez le contester. Mais cela vous expose à des poursuites devant un tribunal américain, ce qui n’était pas un risque que je pouvais me permettre en tant que jeune diplômé endetté« , explique-t-il à The Verge.

Bien que Warner Bros. ait temporairement retiré sa plainte suite à l’intervention d’un journaliste, l’épée de Damoclès juridique continuait de planer. Cette expérience traumatisante l’a définitivement convaincu de ne plus jamais utiliser le travail d’autrui sans consentement ni rémunération.

Des capacités créatives de l’intelligence artificielle insoupçonnées

Terence Broad a-t-il réussi à extraire une créativité artificielle « pure » ? L’intéressé n’en est pas entièrement sûr. « Aucune représentation ou caractéristique externe n’est imposée aux sorties des réseaux, mais j’ai émis l’hypothèse que mes préférences esthétiques personnelles ont pu influencer ce processus comme une forme de ‘méta-heuristique' », reconnaît-il.

Ces propos reflètent, comme le souligne The Verge, que l’intelligence artificielle générative recèle encore de nombreux territoires inexplorés, susceptibles de transformer notre compréhension de cette technologie.

Cette méconnaissance s’explique en partie par l’opacité qui entoure certaines des plus grandes entreprises d’IA. À l’instar, ironise Broad, d’une entreprise nommée OpenAI (littéralement « IA Ouverte »), qui « reste hautement secrète sur ses modèles et ses données d’entrée ».

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.