
Le géant japonais mise sur de nombreuses rééditions d’anciens succès pour sa nouvelle console Nintendo Switch 2. Une stratégie de valorisation qui répond aux nouveaux impératifs d’une industrie désormais mature.
C’est un constat du journal Le Monde : deux tiers des 23 jeux confirmés comme disponibles au lancement de la Nintendo Switch 2 ce jeudi 5 juin, sont anciens, autrement dit des rééditions. De quoi refroidir le public qui attend nombreux cette console hybride – à la fois portable et de salon – prévue pour capitaliser sur le succès de son aînée ?
Réponse dans les prochains mois, alors que la firme japonaise parie sur une vente à 15 millions d’unités d’ici à mars 2026, d’après son rapport annuel consulté par le quotidien français. Cette approche par la réédition n’est toutefois pas inédite chez l’entreprise basée à Kyoto.
Comme relevé par Le Monde, il s’agit d’une recette remontant au lancement de la GameCube en 2001 et qui s’est depuis généralisée dans l’industrie du jeu vidéo. Sony, Microsoft ou encore Activision l’ayant notamment adoptée.
Derrière cette stratégique se cache une logique économique implacable : minimiser les risques en capitalisant sur des valeurs sûres.
Le business model du « déjà-vu amélioré »
En effet, développer un jeu AAA – c’est-à-dire de qualité supérieure – coûte désormais entre 50 et 200 millions de dollars, sans garantie de succès. Face à de telles ardoises, les studios préfèrent remettre au goût du jour des titres déjà appréciés plutôt que de prendre des risques créatifs.
Après tout, pourquoi remettre en cause une recette gagnante ? D’autant que ces rééditions se vendent au prix fort avec souvent de simples améliorations cosmétiques. Par ailleurs, l’alternative – augmenter le prix des nouveaux jeux pour financer leur développement – serait impopulaire dans un contexte d’inflation.
Une perspective commercialement suicidaire donc, dans une industrie où le succès repose largement sur le bouche-à-oreille. Avec sa stratégie du « déjà-vu amélioré », Nintendo capitalise sur la nostalgie et l’attachement de ses fans. Difficile de résister à l’appel de Mario Kart ou Zelda, même ressortis pour la énième fois.
Entre pragmatisme et déception créative
Cette stratégie garantit un catalogue étoffé dès le lancement et évite l’écueil du manque de contenu qui handicape souvent les nouvelles consoles. Elle permet aussi aux développeurs de se familiariser avec le nouveau matériel sur des bases maîtrisées.
Elle interroge néanmoins dans une industrie bâtie sur l’innovation, un facteur concurrentiel primordial. En effet, quand l’exploitation du patrimoine existant remplace systématiquement la créativité, que devient la prise de risque qui a toujours nourri le secteur ?
Le danger est de finir par lasser une communauté en quête de nouveauté. Car si les remasters rassurent à court terme, ils ne sauraient indéfiniment remplacer l’émotion unique des véritables créations originales.